LES FIBRES

Agriculture du lin (“liniculture”) et du chanvre

Du semis à l’arrachage, le lin fabrique une fibre légère et résistante en 100 à 120 jours. Le meilleur terroir pour sa culture associe un climat tempéré maritime et des sols profonds permettant à sa racine pivot de s’installer et soutenir une croissance régulière et rapide des fibres dites “libériennes”, car elles sont situées dans le liber, la partie externe de la tige. Le lin textile atteint environ 1m de haut à maturité.
La France cultive chaque année environ 140.000 hectares de lin textile, en rotation avec d’autres cultures sur environ 1 million d’hectares d’excellentes terres agricoles qui portent du lin tous les 6 à 7 ans en alternance avec des céréales, légumes, protéagineux, prairies fourragères, betteraves sucrières, etc.

Le chanvre est également une plante cultivée pour ses fibres libérienne. La plante dispose d’un système racinaire plus large, étendu et profond que le lin et elle développe une tige plus large et haute pouvant dépasser 2m à maturité. Si la culture du chanvre pour un usage textile a été progressivement abandonnée en France depuis des décennies, plusieurs projets sont en cours qui visent à recréer une filière de chanvre textile cultivé en France.

Semences / variétés

Chaque variété de lin ou de chanvre a des caractéristiques agronomiques (précocité, rapidité de croissance, résistance ou tolérance aux maladies, etc.) et textile (taux et qualité des fibres) différentes qui rendent la culture plus ou moins adaptée à certains terroirs et à certains usages textiles. Dans le cas du chanvre, il faut également tenir compte des contraintes réglementaires pour limiter le taux de THC (principe actif du chanvre psychotrope) en-deçà du seuil réglementaire (0.2%).

Le développement de variétés est un travail de long terme, et il faut souvent plus de 10 ans de recherche et développement avant de pouvoir inscrire au catalogue officiel une nouvelle variété de lin ou de chanvre.

La France dispose de semenciers de référence qui développent, multiplient et commercialisent les principales variétés de lin et de chanvre textile.

Semis

En France, le semis du lin de printemps se fait entre le 15 mars et le 15 avril dans une « terre amoureuse » comme l’appelaient autrefois les anciens paysans. Cette terre doit être bien affinée sur le dessus, meuble en profondeur, retassée en surface et bien réchauffée pour permettre une levée rapide. La graine est très petite, on en sème 2000 au mètre carré pour récolter autant de tiges fines, porteuses des fibres.

Floraison

“Qui n’a pas vu un champ de lin en fleur, n’a rien vu de beau”

une maxime que tous les Cauchois connaissent ! Le Pays de Caux est reconnu pour être un terroir d’excellence pour le lin. Si les graines ont été semées le 30 mars, la floraison des champs de lin est optimale aux environs du 15 juin. Chaque fleur ne fleurit qu’une seule demi-journée et se fane autour de midi.

Le semis du lin d’hiver se fait, à l’instar du blé, en octobre ou novembre pour permettre d’installer la culture avant l’arrivée des gelées hivernales, que le lin d’hiver supporte correctement tant qu’il n’est pas trop haut.

Le chanvre quant à lui se sème en mai, dans un sol réchauffé et suffisamment humide (ou idéalement juste avant une pluie) pour permettre la levée, le stade le plus difficile de la conduite agricole du chanvre.

Arrachage ou fauche

La récolte est une étape clé. Elle consiste, lorsque la plante arrive au stade de la maturité optimale des fibres (variable selon la météo, mais typiquement en juin pour le lin d’hiver, juillet pour le lin de printemps et août pour le chanvre textile) à faucher ou arracher la plante et la déposer au sol pour le rouissage.

Contrairement à la plupart des cultures qui sont fauchées, le lin est arraché avec du matériel spécifique : l’arracheuse de lin. Cette étape préserve les fibres au maximum car celles-ci descendent jusqu’à la racine pivot.

La racine du chanvre, en revanche, est impropre à une utilisation en filature textile et trop robuste pour permettre l’arrachage et le chanvre est donc fauché.

Rouissage

Traditionnellement, le lin et le chanvre étaient rouis à l’eau, en bassins ou en rivières. Ce procédé est désormais abandonné, et interdit car il cause des nuisances environnementales (odeurs et eutrophisation des cours d’eau).
Le rouissage au sol utilisé par toute la filière lin en France est un procédé naturel, au cours duquel les micro-organismes développés sous l’action de l’humidité du sol et de la chaleur se développent et attaquent les « ciments » qui lient les faisceaux de fibres entre eux et au reste de la plante.
Cette action enzymatique naturelle permet d’obtenir une bonne extraction des fibres au teillage.
Véritable clé de la qualité des fibres, le rouissage doit être porté à son optimum en fonction des conditions météo ; il doit aussi être homogène.

Les essais de rouissage au sol du chanvre laissent espérer que cette technique pourra être utilisée à grande échelle également pour cette culture.

Des essais sont régulièrement menés également de rouissage enzymatique à l’eau, dans des équipements industriels, notamment pour obtenir des fibres courtes permettant une utilisation en filature coton.

Enroulage et Stockage

Une fois bien roui au sol le lin ou le chanvre est récolté par beau temps, entre septembre et octobre, environ six semaines après son arrachage. C’est une opération à risque car un excès de rouissage détériore la qualité de la fibre. Cette récolte est ensuite stockée chez l’agriculteur qui la transportera au teillage tout au long de l’année.

Teillage

Le teillage est l’extraction mécanique de la fibre des pailles de lin ou de chanvre. Il s’effectue lot par lot. Généralement, un lot représente au plus un champ de lin.
C’est une opération 100% mécanique au cours de laquelle on vient broyer la paille pour obtenir différents co-produits. Il est remarquable que le lin est une culture “zéro déchet” car la totalité des parties de la plante sont utilisées :

  • La fibre longue, communément appelée « lin ou chanvre teillé » ou « filasse » constitue la valorisation principale pour la filature.
  • Les fibres courtes aussi appelées étoupes de teillage qui peuvent aller également en filature, ou pour d’autres usages textile (corderie, papeterie, isolation des bâtiments, etc.)
  • Les anas , fragments ligneux du lin, qui seront ultérieurement valorisés sous forme de litières animales, de paillages horticoles ou pour de l’aggloméré.
  • Les graines (dans le cas du lin textile, car le chanvre est récolté pour le teillage avant maturité des graines) sont utilisées pour l’industrie (huile), la complémentation alimentaire du bétail (oméga 3) ou l’alimentation humaine (surtout en agriculture biologique)
  • Les poussières qui peuvent servir pour l’absorption de lisiers ou comme amendement du sol.

La teilleuse doit être réglée de façon optimale pour que l’on puisse obtenir le meilleur de chaque lot.
Le teillage nécessite un savoir-faire et une connaissance de la fibre que les opérateurs acquièrent par l’expérience.
En fin de teillage, des échantillons représentatifs du lin teillé sont prélevés.
Les fibres longues et les étoupes sont ensuite classées en fonction de leur qualité.

Prêtes pour être peignées et filées !

Peignage

Le peignage, réalisé mécaniquement, est la deuxième transformation de la filasse de lin ou de chanvre.
La filasse est déposée sous forme de nappe de façon à ce qu’elle soit la plus régulière possible pour que le peignage soit le plus efficace.
La peigneuse composée de peignes (assemblages d’aiguilles de plus en plus fines et rapprochées) va permettre de démêler la filasse, d’enlever les débris et noeuds restants, de diviser les faisceaux et ainsi de lui donner son apparence soyeuse.
La filasse une fois démêlée est ensuite étalée en ruban et prête à être filée.

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